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conseille toujours de faire tout ce qu’on exige d’eux, d’entrer au service, de servir, de prêter serment etc., — si cela est leur moralement possible, de ne s’abstenir de rien, à moins que cela ne devient tout aussi impossible moralement, comme il est imposible à un homme d’enlever une montagne ou de se soulever dans les airs. Je leur dis toujours: si vous voulez refuser le service militaire et supporter toutes les suites de ce refus, tâchez d’arriver à un tel degré de certitude et de clarté de la vérité chrétienne, qu’il vous devienne tout aussi impossible de prêter serment et de manoeuvrer avec un fusil, comme il vous est impossible d’égorger un enfant ou autre chose pareille. Mais si cela vous est possible — faites-le, car il vaut mieux fournir un soldat, qu’un hypocrite de plus, ou bien un renégat de la doctrine, ce qui arrive à ceux qui entreprennent des actions audessus de leurs forces. C’est pourquoi je suis convaincu, que la vérité chrétienne ne peut pas se propager par la prédication de certaines actions extérieures, comme cela se fait dans les religions quasi-chrétiennes, mais seulement par la destruction, la démonstration des tentations et des impostures et surtout par la conviction de ce que le vrai et l’unique bien de l’homme consiste dans l’accomplissement de la volonté de Dieu, qui n’est autre que la loi de la destination de l’homme.

Dans le moment ou je vous écrit il y a deux jeunes gens1 de mes amis qui sont enfermés l’un dans une prison, l’autre dans une maison de fous, pour avoir refusé le service militaire. L’un d’eux — un jeune peintre — est à Moscou. Eh bien, je tâche de l’influencer aussi peu que possible dans son refus, car je sais que pour supporter toutes les epreuves qu’il aura à subir, il lui faut la force qui ne peut pas venir d’en dehors, mais la ferme conviction que sa vie n’a pas d’autre sens que l’accomplissement de la volonté de celui qui l’y a envoyé. Et cette conviction se forme intérieurement. Je puis l’aider à la former, mais je ne puis pas la lui donner. Je crains surtout de lui faire croire qu’il a cette conviction, quand il ne l’a pas. J’ai de la difficulté de m’exprimer en français, mais j’espère que vous comprendrez mon idée, d’autant plus que je crois l’avoir exprimé dans mes écrits, qui sont traduits.

L’idée d’une grève militaire a été annoncée par un des vos compatriotes que j’estime beaucoup, quoique j’ai oublié son nom (Domela2 — je crois) à l’avant-dernier congrès socialiste. Si vous me faites le plaisir de m’écrire encore une fois, donnez moi,

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